Maladies neuromusculaires : gros plan sur les personnes en attente d’un diagnostic

En France, un patient sur dix suivis dans un centre expert pour une maladie neuromusculaire n’a pas encore reçu de diagnostic précis. Portrait.
Près de 5 700 personnes qui consultent dans un Centre de référence ou de compétences de la filière Filnemus ne savent pas exactement de quelle maladie neuromusculaire elles sont atteintes. Ce groupe au « diagnostic non confirmé » représente très exactement 13,5% des patients enregistrés sur la période 2017–2022 dans la Banque nationale de données des maladies rares (BNDMR), laquelle recense toutes les personnes suivies pour une maladie rare par un centre spécialisé.
L’âge augmente le risque d’errance...
Une étude conduite sur les données de ce grand registre révèle que ni le lieu de résidence, ni le statut socio-économique n’influencent le statut diagnostique. Que l’on habite en Ile-de-France ou dans le Limousin, juste à côté d’un centre expert ou à plus de 100 kilomètres, que l’on dispose de petits revenus ou d’une grosse fortune, les chances de mettre un nom sur sa maladie neuromusculaire sont les mêmes.
La date de naissance joue en revanche un rôle sensible : les patients âgés de plus de 50 ans sont plus nombreux (près de 21%) à attendre un diagnostic précis. Il est en effet plus compliqué de diagnostiquer une maladie neuromusculaire chez des seniors par ailleurs souvent atteints d’autres pathologies, d’autant que les symptômes musculaires (faiblesse, douleurs...) sont souvent attribués au vieillissement normal. Les plus âgés ont ainsi tendance à attendre plus longtemps avant de prendre rendez-vous pour une consultation spécialisée, ce qui contribue à augmenter l’errance et l’impasse diagnostiques.
Les mots pour le dire
- L’errance diagnostique désigne la période qui sépare l’apparition des premiers symptômes de la date à laquelle le médecin pose un diagnostic précis c’est-à-dire a identifié le nom de la maladie, et celui du gène en cause lorsqu’il s’agit d’une maladie génétique.
- Être en situation d’impasse diagnostique, c’est ne pas connaitre la cause précise de la maladie en dépit de la mise en œuvre de l’ensemble des examens disponibles à ce moment-là. Source : PNMR3
... le type de maladie aussi est important
Dernier facteur d’influence, la maladie neuromusculaire en cause. Certaines d’entre elles sont plus à risque d’errance ou d’impasse diagnostique que d’autres, comme :
- celles où seule une augmentation du taux de créatine phosphokinase (CPK) est identifiée, sans symptôme musculaire, une situation dans laquelle le diagnostic est « non confirmé » dans 45% des cas,
- les myopathies mitochondriales (45% de diagnostic non confirmé),
- la dystrophie musculaire de Bethlem (23%),
- la polymyosite (20%),
- la myopathie congénitale à central cores (20%).
Pourquoi ? En raison de leur grande rareté, de leur expression très variable, du nombre et de la complexité des examens à réaliser pour parvenir à les identifier ou encore de l’absence d’examen diagnostique spécifique. C’est le cas notamment lorsque l’on n’a pas encore identifié le gène impliqué dans une maladie donnée. Mais cette énigme génétique peut finir par être résolue. Il est donc essentiel de continuer à prendre des rendez-vous réguliers en centre expert quand on n’a pas (encore) de diagnostic, même si les premières manifestations de la maladie datent de plusieurs décennies.
L’AFM-Téléthon très impliquée
Une étude un peu plus ancienne estime que 30% des patients atteints d’une maladie rare (quelle qu’elle soit) inscrits à la BNDMR sont en situation d’errance ou d’impasse diagnostique. Un taux de 13,5% pour les maladies neuromusculaires, c’est bien plus faible... mais toujours trop ! D’autant qu’il faut y ajouter les personnes qui ne sont pas suivies par un Centre de référence ou de compétences.
L’AFM-Téléthon a fait de la lutte contre l’errance et l’impasse diagnostiques dans les maladies neuromusculaires une priorité, avec le déploiement en 2019 d’un premier plan « Un diagnostic pour chacun », en collaboration avec la filière Filnemus et ses centres experts. « Les services régionaux de l’AFM-Téléthon se sont fortement mobilisés, contactant toutes les personnes qu’ils accompagnaient et qui étaient sans diagnostic, ajoute Carole André, copilote de ce plan au sein de l’association. En 2022, le nombre de personnes accompagnées ayant un diagnostic plus précis avait augmenté de 22% ».
Un deuxième plan est en cours. L’objectif ? « Que toute personne connue d’un service régional et souhaitant avoir un diagnostic précis soit dans un parcours adapté et complet de recherche diagnostique : elle doit être informée, orientée et savoir où elle en est de ce parcours ».
Pour en savoir plus
• Lire le dossier du magazine VLM consacré en 2019 au 1er plan « Un diagnostic pour chacun ».
• Contacter le Groupe d’Intérêt Maladies neuromusculaires non diagnostiquées de l’AFM-Téléthon, qui accompagne et apporte son soutien aux malades et familles concernées par une attente de diagnostic.
Sources :
Diagnostic Impasse and Wandering in Patients With Rare Neuromuscular Diseases: Insights Into Patient Characteristics From the French National Network for Rare Neuromuscular Diseases (FILNEMUS) and the French National Rare Disease Database (BNDMR).
Dumas R, Jannot AS, Elarouci N et al.
Eur J Neurol. 2025 Sep;32(9):e70347.
BNDMR infrastructure team. Overview of patients' cohorts in the French National rare disease registry.
Pichon T, Messiaen C, Soussand L et al.
Orphanet J Rare Dis. 2023 Jul 3;18(1):176.