Glycogénose musculaire

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Les glycogénoses musculaires sont des maladies d’origine génétique liées à une accumulation de glycogène dans les cellules. Poser le diagnostic est essentiel pour bénéficier d’une prise en charge optimale. Apporter l’enzyme manquante est déjà possible dans la glycogénose de type II ou maladie de Pompe. D’autres traitements, notamment de thérapie génique, sont à l’étude.

Que sont les glycogénoses musculaires ?

Les glycogénoses musculaires sont des maladies musculaires rares d’origine génétique qui se traduisent par une accumulation anormale d’une forme de réserve d’énergie appelée glycogène.

Le glycogène dans les glycogénoses musculaires
• Habituellement, les sucres (glucides) que nous mangeons et que nous n'utilisons pas tout de suite sont stockés dans les cellules sous forme de glycogène.
• Lors de l'exercice physique, le glycogène est transformé en énergie (ATP) utilisable par les muscles, grâce à une série de réactions biochimiques qui font intervenir plusieurs enzymes (déstockage). Une partie du glycogène est aussi régulièrement recyclée grâce à d'autres réactions chimiques.
• Si l’une de ces réactions ne se fait pas ou se fait mal, le glycogène s'accumule dans les cellules sans pouvoir être utilisé ou recyclé. C'est ce qui se passe dans les glycogénoses musculaires, où son accumulation perturbe le fonctionnement de différents organes (muscles, foie, cœur, cerveau...).

Infographie - Fibre musculaire

Les glycogénoses musculaires se manifestent très différemment d'une forme à l'autre. Elles entrainent fréquemment une intolérance à l'effort, des douleurs musculaires (myalgies) ou des crampes. Les symptômes se déclenchent lors de l’exercice physique.

Le foie et le muscle sont les organes les plus souvent atteints car ils présentent des réserves importantes en glycogène.

Il existe plusieurs types de glycogénoses musculaires :

  • le déficit en glycogène synthase musculaire (glycogénose de type 0)
  • la maladie de Pompe (glycogénose de type II)
  • la maladie de Cori ou maladie de Forbes (glycogénose de type III)
  • la maladie d'Andersen (glycogénose de type IV)
  • la maladie de Mc Ardle (glycogénose de type V)
  • la maladie de Tarui (glycogénose de type VII)
  • le déficit en phosphorylase kinase (glycogénose de type IX)
  • la maladie de Di Mauro (glycogénose de type X)
  • le déficit en bêta-énolase musculaire (glycogénose de type XIII)
  • le déficit en phosphoglucomutase (glycogénose de type XIV)
  • le déficit en glycogénine-1 (glycogénose de type XV)

Leur grande rareté retarde souvent le diagnostic et donc la prise en charge, en particulier lorsque la maladie commence à se manifester à l’âge adulte.

Les formes néonatales se caractérisent le plus souvent par une baisse du tonus musculaire (ou hypotonie généralisée). Sans traitement précoce, l'évolution est rapide et fatale.

Les formes plus tardives évoluent lentement. Certaines personnes développent une faiblesse musculaire permanente, notamment dans les muscles des épaules, des hanches, des bras et des jambes.

Que peut-on faire ?

Le diagnostic précoce permet de mettre en route une prise en charge adaptée, idéalement dans le cadre de consultations pluridisciplinaires spécialisées dans les maladies neuromusculaires.

À l’exception de la maladie de Pompe (ou glycogénose de type II) où un traitement visant à fournir l’enzyme manquante (enzymothérapie substitutive) est disponible depuis quelques années, aucun traitement spécifique n'est disponible actuellement dans les glycogénoses musculaires.

Limiter les efforts intenses, aménager des temps de repos, adapter son régime alimentaire selon des critères précis et éviter les épisodes d’hypoglycémie permettent de mieux vivre au quotidien.

Le conseil génétique permet d'informer et d'accompagner une personne, ou une famille, confrontée au risque de développer ou de transmettre cette maladie.

À quoi sont-elles dues ?

Toutes les glycogénoses musculaires sont des maladies d’origine génétique : elles sont dues à des anomalies de l'ADN qui constitue certains gènes. Ces gènes codent des enzymes impliquées dans l’utilisation ou le recyclage du glycogène.

Schéma - Métabolisme du glucose

 

Où en est la recherche dans les glycogénoses musculaires ?

La recherche dans les glycogénoses en chiffres
63 essais et études cliniques en cours ou en préparation dans les glycogénoses répertoriés sur le site ClinicalTrials.gov (interrogation du 12 juin 2022).
31 articles sur les glycogénoses musculaires publiés dans la littérature médicale et scientifique au cours de l'année 2021  (d'après Pubmed, interrogation du 12 juin 2022).

Des pistes thérapeutiques

Les approches thérapeutiques en cours de développement ciblent les gènes codant l’enzyme défectueuse grâce à la thérapie génique ou à des micro-ARN, cherchent à améliorer l’efficacité de l’enzymothérapie, atténuent le retentissement de la maladie avec des exosquelettes…

Améliorer l’enzymothérapie dans la glycogénose de type II

Si l’enzymothérapie de substitution est utilisée depuis une quinzaine d’année comme traitement de la maladie de Pompe, plusieurs sociétés pharmaceutiques s’efforcent d’en améliorer l’efficacité. 

L’UX053 dans la glycogénose de type III

L’UX053 est un produit de thérapie génique, développé par Ultragenyx, qui vise à apporter l’ARN messager codant l’enzyme débranchante du glycogène encapsulé dans une nanoparticule lipidique.

    Le saviez-vous ?

    Pour apporter un produit de thérapie génique au cœur de la cellule, différents transporteurs (les chercheurs parlent de « vecteurs ») du produit de thérapie génique ont été mis au point : 
    - des vecteurs viraux, dont la partie qui rend malade est remplacée par le produit de thérapie génique ;
    - des vecteurs synthétiques comme des nanoparticules lipidiques qui sont de toutes petites gouttelettes de graisse qui englobent le produit de thérapie génique.

    Les études précliniques dans de nombreux modèles expérimentaux ont montré que l’administration de l’ UX053 diminue la quantité de glycogène contenue dans le foie. Un essai est en cours aux États-Unis, en Italie et en Espagne. Il n’a pas encore démarré en France (Hôpital Femme Mère Enfant, Bron et Institut de Myologie, Paris et Hôpital Antoine Béclère, Clamart) et au Royaume-Uni. 
    Une première partie en ouvert évalue quatre doses uniques croissantes d’UX053. Puis dans un deuxième temps, quatre doses répétées cinq fois toutes les deux semaines sont évaluées en double aveugle contre un placebo chez trente participants atteints de glycogénose de type III, âgés de 18 ans et plus.

    Deux exosquelettes à l’essai à l’Institut de Myologie

    Les exosquelettes Myosuit™ et Keeogo™ sont en cours d’expérimentation chez des personnes présentant une maladie neuromusculaire (y compris une glycogénose musculaire) avec une atteinte des muscles des hanches et des genoux et une marche en partie préservée.
    Les essais se déroulent à l’Institut de Myologie (Paris) et concernent 52 participants, âgés de 18 à 70 ans.

    Des recommandations internationales et des résultats décevants dans les glycogénoses de type V et VII

    • Des guides de prise en charge des glycogénoses de type V (maladie de McArdle) et de type VII (maladie de Tarui) établis par des experts européens et américains à la demande de l’Association internationale pour les glycogénoses musculaires ont été publiés en décembre 2021.
    • Les essais d’une supplémentation en corps cétoniques dans la maladie de McArdle et de la triheptanoïne dans la maladie de Tarui n’ont démontré aucun effet sur les capacités d’exercice des participants.

    Deux pistes thérapeutiques pour les myopathies à polyglucosan

    • Le 114DG11 améliore la santé d’une souris modèle de myopathie à polyglucosan liée à un déficit en enzyme débranchante.
    • Un microARN artificiel ciblant la glycogène synthase diminue considérablement les dépôts de glycogène anormal (inclusions à polyglucosan) et les signes d’inflammation du tissu nerveux d’une souris modèle de glycogénose par déficit en enzyme branchante.

    Des entrepôts de données 

    Avec les progrès de la génétique, les chercheurs connaissent désormais beaucoup mieux les bases génétiques des glycogénoses musculaires. Cependant, les mécanismes en jeu dans l'apparition de certains symptômes (crampe musculaire aiguë, faiblesse musculaire chronique) sont moins bien identifiés.

    Afin de mieux connaître ces maladies, chercheurs et médecins mettent en place des registres. Ces entrepôts de données permettent de recueillir les informations médicales concernant des personnes atteintes d’une même maladie. Leur objectif est de faire progresser les connaissances, d’améliorer le diagnostic et les traitements et de faciliter le recrutement de patients pour les essais cliniques.

    Registres patients et bases de données
    • Le registre français de la maladie de Pompe (glycogénose de type II) a été créé en 2004, sous la responsabilité scientifique du Pr Pascal Laforêt (Hôpital Raymond Poincaré, Garches) et avec le soutien de l’AFM-Téléthon. En février 2019, ce registre recensait 212 personnes atteintes de maladie de Pompe.
    • Une base de données Glycogénose de type III (maladie de Forbes ou de Cori) est née en 2014 d'une collaboration entre un Centre de référence Maladies neuromusculaires (Institut de Myologie, Paris) et un Centre de référence Maladies héréditaires du métabolisme hépatique (Hôpital Béclère, Clamart). En avril 2018, 54 patients étaient inclus dans cette base de données.
    • Un registre international Glycogénose de type V (maladie de McArdle) et autres glycogénoses musculaires avec intolérance à l'effort (hors maladie de Pompe) a été créé en 2013. Nommé EUROMAC registry, ce projet regroupe des données provenant de dix pays européens dont la France et des États-Unis. En novembre 2020, cette base de données recensait 282 patients dont 269 atteints de maladie de McArdle.

    Des journées de travail

    Les chercheurs et les médecins impliqués dans la recherche sur les glycogénoses se réunissent régulièrement à l’occasion de journées de travail nationales ou internationales (Journée Française de la maladie de Pompe, Journée française sur la glycogénose de type III, atelier de l'European NeuroMuscular Centre...) ou de grands colloques internationaux comme le congrès Myology organisé par l’AFM-Téléthon, ou la Conférence internationale sur les glycogénoses (IGSD) dont la sixième édition s'est tenue en ligne en septembre 2021.